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Trois milliards pour moderniser les filières animales

Selon le patron de la FNSEA, Xavier Beulin, l’agriculture française aurait besoin d’une injection de trois milliards d’euros sur trois ans pour retrouver « la compétitivité perdue » face à ses voisins européens. Il ne s’agit pas d’apporter un énième soutien conjoncturel aux éleveurs – même si cela peut s’avérer nécessaire dans les cas les plus désespérés –, mais d’engager un vaste plan de modernisation, tout en dotant l’agriculture d’une vision à quinze ans. Quoi qu’en pense le journaliste Périco Légasse, qui signe dans Le Figaro une tribune accusatrice contre « l’agriculture productiviste hors sol », à laquelle il préfère une paysannerie has been, le monde du XXIe siècle n’est pas celui du XXe. Les mesures nécessaires pour tirer les filières agricoles de leurs difficultés nécessitent d’abord de ne pas se tromper quant à l’état des lieux. Ensuite, elles exigent de proposer des solutions qui s’inscrivent dans le monde réel, et non pas dans un monde imaginaire. Comme celui de l’agronome altermondialiste Marc Dufumier et du porte-parole de la Conf’ Laurent Pinatel, qui proposent de financer « la réintroduction de coccinelles pour chasser les pucerons, de scarabées pour s’en prendre aux limaces », et de « booster la demande en produits bio ».

Ainsi, les filières bovine et porcine ne pourront pas faire l’économie d’une réelle révolution. Contrairement aux discours que l’on entend partout, la politique agricole française concernant l’élevage bovin (avec, certes, des différences significatives entre bovins viande et bovins lait) a en effet été conduite pendant plusieurs décennies dans un souci d’occupation territoriale, et non pas dans une logique économique. Ce choix, au demeurant compréhensible, devient aujourd’hui difficilement soutenable dans une économie ouverte, avec de surcroît une consommation de viande qui a fortement évolué depuis trente ans. Il faut donc redonner à la filière bovine un nouvel objectif et de nouvelles perspectives, qui s’inscrivent dans la réalité économique. Cela passe nécessairement par une restructuration des filières, une meilleure organisation des producteurs, une modernisation des unités de production et un volontarisme affiché pour favoriser les exportations, avec un travail de fond sur la segmentation des marchés. C’est-à-dire exactement le contraire de ce que proposent Marc Dufumier et ses amis écologistes…

Pour la filière porcine, les problèmes sont différents. Après des décennies de « vaches grasses », ses acteurs connaissent depuis plus de dix ans une période de « vaches maigres ». Ils rencontrent crise sur crise, alors que nos voisins européens –et notamment espagnols– ont pris le temps de restructurer leur outil de production. Faute d’investissement –et donc de modernisation–, la production d’un éleveur français ne peut plus concurrencer celle d’un éleveur danois ou néerlandais (100 kilos de carcasse de porc par heure, contre 140 pour un éleveur néerlandais et 134 pour un éleveur danois, selon un rapport commandité en 2012 par l’ancien ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire). En cause principalement : les contraintes environnementales et réglementaires nationales de plus en plus exigeantes, qui ont mis un frein à la modernisation des outils de production. Très souvent imposées au nom de l’écologie, ces contraintes excessives ont un coût, que la filière paie aujourd’hui au prix fort.

 

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