«N’en déplaise à Claude Allègre, le réchauffement climatique se fait sentir jusqu’au fond du cornet de frites », peut-on lire dans un article non signé du Canard Enchaîné paru le 14 mars 2007. L’auteur en veut pour preuve que le « coup de chaud de juillet dernier a rabougri les pommes de terre dans lesquelles on taille les frites ». Conséquence : ces gros calibres se négocient désormais à 360 euros la tonne, soit plus du double qu’il y a un an. L’hebdomadaire satirique, excellent lorsqu’il s’agit par exemple de calculer les vrais montants de l’ISF qu’auraient dû payer Sarkozy, Royal et consorts, semble beaucoup moins à l’aise en ce qui concerne les bases élémentaires de l’agronomie ! Car ce n’est pas tant le manque d’eau de juillet dernier que le coup de froid et d’humidité qui a sévi en août qui a ratatiné les patates ! « La pomme de terre est une plante crédule, et lorsqu’il pleut, elle se croit au printemps, ce qui explique qu’en août dernier, les tubercules se sont vidés au profit de nouvelles repousses. Ce phénomène bien connu, et qui s’appelle “stress thermique”, fait en sorte que les patates se recroquevillent », explique Frédéric Jaubert, directeur général de McCain France, le plus gros producteur de frites de l’Hexagone. Du coup, la récolte européenne 2006 a été la plus mauvaise de ces 25 dernières années, avec des volumes en chute de 25 à 30 % sur les gros calibres, et un rendement à l’hectare qui a baissé de 16 % aux Pays-Bas et jusqu’à 21% en Allemagne.
N’en déplaise donc à l’hebdomadaire de la rue St Honoré, ce n’est pas le « réchauffement climatique » qui a donné le coup de grâce à la patate ! D’ailleurs, en 2003, vraie année de canicule, il y a eu surproduction de pommes de terre, ce qui a entraîné les prix vers un plancher de 35 euros la tonne, soit dix fois moins qu’aujourd’hui !
A sa décharge, il faut admettre que le journaliste du Canard n’est pas le seul à s’être « planté ». Dans une chronique parue le 27 février dans le Monde Economique, Marie-Béatrice Baudet avait également expliqué que « la pomme de terre, comme les ours blancs, souffre du réchauffement climatique ». On finirait par croire que celui-ci est devenu pour certains une véritable obsession…