AccueilBiotechnologiesOGM : Les connaissances très approximatives de Monsieur le Député

OGM : Les connaissances très approximatives de Monsieur le Député

A la pointe du combat contre les OGM, Philippe Martin, député du Gers, est l’un des grands spécialistes des biotechnologies au sein du Parti socialiste. Après avoir déclaré sa région « zone sans OGM », le député a récemment déposé un recours auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) contre la Commission européenne, au motif que celle-ci continue à autoriser l’importation de nouvelles variétés de maïs. Philippe Martin justifie son hostilité farouche aux OGM par le fait que ceux-ci font partie d’un « système d’intégration et d’aliénation des agriculteurs ». Lors d’un Forum organisé par le quotidien Libération à Lyon, le député a ainsi développé sa pensée : « Les agriculteurs sont désormais tenus par une firme qui va leur vendre tout et ils ne pourront pas sortir de cela. Il y a aujourd’hui un énorme débat parce que le Round Up justement va tomber dans le domaine public en 2014. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, d’autres semenciers qui payent des royalties à Monsanto pour pouvoir utiliser ce Round Up vont pouvoir aller dans le domaine public. Et Monsanto est tellement inquiet de cela qu’il met de nouveaux gènes à l’intérieur de son Round Up pour rendre, après 2014, encore plus difficile le fait de le faire ».

Or, il y a dans cette déclaration de moins d’une minute au moins deux erreurs :

Erreur n°1 : Le Round Up ne va pas tomber dans le domaine public en 2014,  sa matière active l’étant déjà depuis le début des années 1990 ! D’ailleurs, aucun semencier – ni d’ailleurs aucun producteur d’herbicides, hormis Monsanto – n’achète ni ne vend de Round Up.

 Erreur n°2 : il n’y a pas de gène dans le Round Up, puisqu’il s’agit d’une formulation chimique ! On voit donc difficilement Monsanto mettre « de nouveaux gènes à l’intérieur » !

En fait, Philippe Martin confond le Round Up, qui est un herbicide, avec le Round Up Ready, qui est une technique consistant à introduire dans une plante un gène résistant à l’herbicide.

Or, il est vrai que les semenciers, qui proposent aux agriculteurs des variétés de maïs incluant ce gène de résistance, payent des royalties à la firme de St Louis. Comme les constructeurs de voitures qui utilisent des pneus Michelin payent des royalties à la société auvergnate, sans que cela n’offusque qui que ce soit… Ainsi, plus de 100 sociétés commercialisent aux Etats-Unis, au Canada ou au Brésil, leurs propres variétés de plantes, contenant notamment ce gène. Bien entendu, rien n’empêche ces semenciers de développer leurs propres gènes de résistance au glyphosate, comme le font d’ailleurs déjà Syngenta ou Pioneer. Certes, en France, cela est plus difficile, car les Faucheurs volontaires détruisent systématiquement tous les essais. Si Philippe Martin était tellement préoccupé par ce quasi monopole qui maintient les agriculteurs dans un système « d’aliénation », ne devrait-il pas plutôt apporter aux semenciers toutes les garanties nécessaires à la bonne tenue d’expérimentations dans son département, afin qu’ils développent des alternatives ?

Par ailleurs, Monsanto n’est pas si « inquiet » que ne le laisse entendre M. Martin, la fin des brevets étant un événement prévisible. Et le semencier américain n’a pas cessé ses recherches depuis la découverte du Round Up Ready. Il commercialise déjà des lignées de maïs qui accumulent plusieurs propriétés conférées par les biotechnologies. Il s’agit de maïs résistant à un herbicide (le Round Up), mais aussi à divers ravageurs aériens et souterrains, comme Diabrotica. Bien entendu, là où de telles variétés de maïs sont disponibles, les agriculteurs concernés n’hésitent pas une seconde. Ils y trouvent un intérêt certain. On peut d’autant mieux les comprendre que ceux qui n’ont pas accès à ces variétés – comme les maïsiculteurs du Gers – sont contraints de déverser dans leurs champs des produits chimiques, en général vendus par… les grandes firmes multinationales !

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