Le verdict est tombé le 5 mai 2015. Et il représente encore une fois un coup dur pour les Faucheurs Volontaires. Pourtant, leur conseiller, Maître Guillaume Tumerelle, avait réussi la prouesse d’obtenir la relaxe des 54 destructeurs de vigne transgénique dans l’affaire qui les opposait à l’Inra suite à leur opération de saccage du 15 août 2010.
Dans son jugement, la Cour d’Appel de Colmar avait en effet exclusivement repris les arguments de l’avocat, qui affirmait que l’autorité ministérielle avait autorisé cet essai suite à « une erreur manifeste d’appréciation des risques inhérents à l’opération litigieuse ». Les magistrats avaient alors rédigé leur arrêt à partir du seul mémoire de Maître Tumerelle et de l’audition des témoins cités par les prévenus. D’où les erreurs et contre-vérités évidentes qui se retrouvaient dans le jugement. Notamment au sujet d’un « risque de recombinaison des virus, dont celui produit par la plante transgénique », alors que la plante ne produit pas de virus, ou encore en ce qui concerne la mention d’« organismes génétiquement implantés sur des porte-greffes », alors que ce sont les porte-greffes qui ont été génétiquement modifiés et non pas les greffons.
Ni les experts de l’Inra – habilement écartés du procès par Maître Tumerelle –, ni ceux du Haut Conseil des Biotechnologies (HCB), pourtant les plus qualifiés pour donner un avis scientifique, n’avaient été consulté par les magistrats de Colmar, qui s’étaient in fine fié aveuglément aux affirmations des Faucheurs et de leurs soutiens. Grave erreur ! En effet, comme le rappelle l’article 593 du code de procédure pénale, « tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ». Et l’article de préciser que « l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ».
Saisie par l’Etat français, la Cour de cassation n’a donc eu aucune difficulté à mettre au jour l’évident manque de rigueur des magistrats de Colmar. Elle relève le fait qu’aucune analyse « de l’ensemble des éléments du dossier de demande d’autorisation [n’a été réalisée] ». Elle déplore ensuite que l’avis du Haut Conseil des Biotechnologies ait été écarté sans explication. Enfin, elle note que seules « certaines études scientifiques ciblant le risque de recombinaison des virus sans aucune référence [ont été retenues] ». Par conséquent, la décision de la Cour d’Appel a été « privée de base légale ». C’est-à-dire prise un peu à la légère… La cassation du jugement s’impose donc, non en raison d’un problème de pure forme, mais bien de fond.
L’arrêt brise ainsi en mille morceaux la stratégie de Maître Tumerelle, qui consistait à écarter tous les experts compétents qui auraient pu démonter ses arguments – sans grande difficulté. Ce dernier ne pourra donc plus éviter un réel débat contradictoire lors du troisième procès, qui se tiendra à Nancy.