Extinction Rebellion, le mouvement de désobéissance civile, annonce une nouvelle action à Lyon le 19 mars
Après un premier happening antinéonicotinoïdes organisé à Paris, le 5 octobre dernier, où une dizaine de militants nus se sont fait asperger de jus de betterave devant l’Assemblée nationale, le mouvement Extinction Rebellion (XR) annonce son retour sur la scène médiatique avec une action antipesticides programmée à Lyon, ce 19 mars, « au petit jour ».
Extinction Rebellion – XR – recrute par internet
Surfant sur les peurs primaires, les militants d’Extinction Rebellion se sentent investis de la mission salvatrice de défendre « le système immunitaire de Gaïa » face aux « entreprises criminelles » de l’agrochimie et aux « élues corrompues qui négligent et méprisent notre démocratie, notre futur, notre Nature ». C’est en ces termes que s’amorce le formulaire de recrutement pour l’opération lyonnaise, qui circule sur Internet. Un passage obligé pour procéder à la répartition méthodique des rôles : le « médiateur police » sera chargé d’entamer le dialogue avec les forces de l’ordre tandis que le photographe ou vidéaste s’occupera des images, et le « peace-keeper » expliquera le sens de l’action en cours aux passants. Car rien n’est laissé au hasard.
Ainsi, « l’observateur légal » devra se charger de récupérer les noms et les numéros de badge des policiers, et des directives très précises permettront de veiller à ce que les bons éléments de langage soient répétés en boucle dans les médias et sur les réseaux sociaux.
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En outre, lors de la répétition générale, les participants, invités à éteindre leur portable et à en retirer la batterie, prennent connaissance de toute une série de « manuels » à l’usage du bon militant. Ainsi, à côté du « manuel de survie en garde à vue» de « ne rien dire, ne rien signer, ne rien avouer », figure le « manuel d’auto-organisation d’action directe non-violente », un document de trente-sept pages particulièrement pédagogiques.
À date récente, les militants de ce mouvement sans leader ont multiplié les actions directes : occupation du centre commercial Italie 2 à Paris ; blocage d’un axe routier de la vallée de l’Arve en Haute-Savoie, pour dénoncer la pollution de l’air ; ou encore jet de 53 kg de plastique dans une fontaine strasbourgeoise pour stigmatiser l’accumulation des déchets. À l’occasion de leur « Rébellion internationale d’octobre », en 2019, des activistes de Bordeaux ont également mis hors service 193 trottinettes électriques en libre-service et dégonflé les pneus de 220 SUV. Désormais, comme en témoigne sa campagne contre les NNI, le mouvement mise sur la vague antipesticides qui submerge l’opinion. Et ce tout nouveau venu dans le monde de l’agribashing mérite toute notre attention, car il risque fort de s’implanter durablement dans le paysage français.
Entre décroissance et culture régénératrice
Lancé au Royaume-Uni à la fin 2018 par des activistes issus de diverses structures écologistes radicales, Extinction Rebellion est aujourd’hui présent dans 70 pays, usant de la désobéissance civile comme principal mode d’action. Dans un reportage de Franceinfo, Damien, un membre de Extinction Rebellion France, expliquait : « Y a vraiment une demande de radicalité, de ras-le-bol, qui émerge dans la société. La stratégie des petits pas ne fonctionne pas. Il faut prendre des mesures radicales », non sans préciser que le mouvement « pratique des méthodes non violentes ».
Collapsologues dans l’âme, les militants d’Extinction Rebellion s’inspirent du rapport Les limites à la croissance, commandité il y a cinquante ans par le Club de Rome. Ainsi, XR reprend à son compte les conclusions dudit rapport, estimant que « le système global tend inéluctablement vers une surchauffe suivie d’un effondrement ». Face à ce constat, XR prône la décroissance « en opposition à la “croissance économique” qui ravage nos écosystèmes et notre Terre », et propose « d’autres formes de croissance : croissance des liens entre nous, les autres êtres vivants, la Terre ; croissance des luttes face à l’écocide, etc. ».
Affirmant qu’ « une culture dominante qui annihile le vivant s’est progressivement emparée du monde durant les dernières centaines d’années », le mouvement promeut une « culture régénératrice », basée notamment sur le yoga, la méditation et diverses formes de spiritualité de tendance New Age. « Nous ne nous contentons pas d’être un réseau d’activistes, nous cherchons aussi les moyens d’incarner et de susciter ce changement positif. Cela peut se faire à l’aide de cérémonies, de prières (spontanées, et non dogmatiques) comme un moyen d’aspirer à ce qui nous dépasse », note ainsi XR.
Une gouvernance obscure
Extinction Rebellion France, qui refuse toute forme de hiérarchie, a adopté un système de gouvernance décentralisé et horizontal. Pas de chef, pas de porte-parole ni non plus de rapport financier, ce qui permet au mouvement de conserver une opacité totale sur ses finances.
« On se sert de la cagnotte en ligne », note une militante XR d’Île-de-France. Et chacun vient avec son propre matériel, quand il s’agit de créer des pancartes par exemple, ainsi que l’explique un instituteur lillois : « On se débrouille en mode DIY [« Do it yourself »] ». Mais le DIY a ses limites. D’où le soutien « pratique » fourni par la discrète association Planète A, créée en 2019, comme le révèle le site bien informé Ecolopedia.fr. Planète A encaisse ainsi en toute opacité les dons destinés à Extinction Rebellion, telle cette cagnotte de 18604 euros réunie lors de la semaine de Rébellion internationale d’octobre 2019.
Mais ce n’est pas tout. Le New York Times a révélé que la structure britannique de XR a bénéficié d’une subvention de 318 000 euros de la part du Climate Emergency Fund (CEF), un fonds créé par l’investisseur Trevor Neilson avec le concours de la fille de l’ancien sénateur Robert Kennedy, Rory Kennedy, et Aileen Getty, héritière d’un empire pétrolier américain.
Toujours selon Ecolopedia, Extinction Rebellion UK aurait également reçu des fonds de Rockefeller Philanthropy Advisors, de Greenpeace, de Patagonia Europe Cooperatief et d’un certain Sir Christopher Hohn, le milliardaire britannique à la tête du hedge fund TCI, qui « a versé 55000 euros à la structure internationale, puis 167000 euros par le biais de sa fondation Children’s Investment Fund Foundation ».