« Après des années florissantes, la consommation de produits bio amorce un recul, qui entraîne une surproduction d’œufs, de lait ou de porc et met en péril la pérennité des fermes », peut-on lire dans une dépêche de l’AFP publiée le 30 janvier dernier.
Résultat : en 2021, le géant laitier Lactalis, qui a dû écouler « plus de 30 % de la collecte du lait bio (…) au prix du lait conventionnel », a décidé de geler tous les nouveaux projets de conversion tandis que son rival Sodiaal a réduit la collecte. Du côté de la production d’œufs, on estime qu’il y a 1,15 million de poules bio en excédent, soit 14 % de l’effectif total de poules bio, en comparaison des besoins actuels du marché, comme le révèle un courrier adressé au ministère de l’Agriculture par des organisations de producteurs de l’ouest de la France.
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Et tandis que les fruits et légumes frais bio accusent également un vrai décrochage, avec des volumes en baisse de 11 % sur un an, selon les chiffres communiqués par Interfel, le cas du porc est particulièrement traumatisant : alors que seul 1 % du cheptel est bio, on est déjà en pleine crise de surproduction, constate amèrement Laurent Guglielmi, à la tête de la société Les Cochonnailles du Haut-Bois à La Bazoche-Gouet. Le jeune patron s’était pourtant félicité, il y a à peine quelques mois, d’avoir obtenu une aide de 400 000 € de France Relance pour soutenir ses investissements de modernisation. « On y croyait, mais désormais tout le monde est déçu », déplore-t-il aujourd’hui.
Et il n’est pas le seul. « Tous les matins, à la radio, on nous disait que le bio se développait en France et en Europe. On s’est dit qu’on ne pouvait pas passer à côté », explique Françoise Roch, une arboricultrice des coteaux de Moissac (Tarn-et-Garonne) qui s’est lancée dans le bio à l’instar de nombre de ses voisins. « Personne ne nous a dit qu’il fallait faire attention, que le bio concernait seulement 4 % des achats, et que l’offre ne devait pas dépasser la demande. Aujourd’hui, c’est la désillusion », raconte l’arboricultrice, dépitée. Tout cela suggère que les campagnes anxiogènes menées par certaines ONG financées par le lobby du bio et qui représentaient une arme essentielle dans la promotion des produits bio, font désormais nettement moins recette…
Il est donc assez cocasse de constater que certains candidats à l’élection présidentielle, certes assez hors-sol, tels Jadot, Mélenchon ou encore Zemmour, continuent à vouloir encourager les conversions au bio, alors que « le consommateur ne suit pas », comme le constate avec pertinence Frédéric Chartier, à la tête de deux poulaillers bio dans les Côtes-d’Armor.