Six mois à peine après les grandes manifestations agricoles, qui avaient réussi à faire enfin saisir à leur juste valeur les attentes du monde agricole, ces dernières ont malheureusement totalement disparu de l’agenda politique. La dissolution de l’Assemblée nationale a ainsi mis en stand-by la navette parlementaire nécessaire à la conclusion de la nouvelle loi de programmation agricole, tout comme elle a également renvoyé aux calendes grecques la promesse de Gabriel Attal de revoir les questions concernant les usages des produits phytosanitaires ou la loi Egalim. Ces sujets ont d’ailleurs été définitivement absents de cette « blitzcampagne » législative, au caractère insolite et d’une virulence inédite.
Il en résulte une absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale, rendant compliquée voire impossible l’adoption d’une politique agricole digne de ce nom, alors que de nombreuses filières connaissent encore une fois de sérieuses difficultés. Ainsi, en raison d’une météo particulièrement pluvieuse, les prévisions de récolte des céréales s’annoncent pessimistes, a indiqué Intercéréales, qui prévoit un rendement moyen en blé tendre autour de 65 q/ha, soit une baisse de 11 % par rapport à la moyenne décennale. De même, pour le secteur des fruits d’été, la qualité tout comme la quantité ne sont pas vraiment au rendez-vous, et la concurrence d’autres pays européens demeure un sujet de préoccupation majeur pour nos producteurs.
Mais le point le plus préoccupant est encore la probable paralysie du travail parlementaire, qui ne permettra certainement pas de dégager un horizon clair pour le secteur agricole. Eu égard aux positions antagonistes des différentes composantes de la nouvelle Assemblée, il est en effet difficile de croire que des dossiers délicats comme les retenues d’eau, Ecophyto ou les distorsions de concurrence pourront être traités avec sérénité. À cela s’ajoute un climat général d’incertitudes économiques qui ne favorisera pas les investissements, pourtant indispensables à la modernisation et à la restructuration de notre agriculture, toujours en perte de parts de marchés dans de nombreux secteurs. Autrement dit, tout le travail qu’il conviendrait de réaliser pour redonner à notre agriculture sa compétitivité semble bien compromis.
Bref, au moment où l’agriculture française s’apprête à traverser de nouveau une période difficile, il est plus que jamais indispensable que la voix de celles et ceux qui portent des projets constructifs et défendent des positions raisonnables soit entendue. Que ce soit au sein du Parlement, sur les réseaux sociaux ou, évidemment, dans les médias. Car la France ne peut pas se permettre de perdre ce joyau national qu’est son agriculture.