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Alerte dans une cantine pendant un service de repas bio

Près de 400 écoliers français ont été intoxiqués à Lorient alors qu’ils venaient de consommer des betteraves bio râpées. « Maux de ventre, vomissements… le repas pris hier midi par plusieurs centaines d’enfants, dans les réfectoires des écoles élémentaires publiques de Lorient, Inzinzach-Lochrist et Auray, a tourné court », relate Sophie Paitier, journaliste au Télégramme.

Les 400 élèves n’avaient pas encore touché au rôti de porc-carottes-lentilles qu’ils ressentaient déjà les premiers symptômes. D’où la très forte suspicion envers des betteraves bio crues râpées, servies en entrée. « Le service a démarré à midi et à peine 10 minutes plus tard l’alerte a été donnée », relate pour A&E Yann Siz, adjoint à la mairie de Lorient en charge de la santé, qui reconnaît l’aspect fulgurant du phénomène. Les pompiers sont immédiatement intervenus, hospitalisant une fillette âgée de 10 ans. Des élèves de 13 écoles sur les 32 servies dans la commune par la cuisine centrale municipale de Kerlétu, ont connu les mêmes symptômes, note le responsable, qui confirme que les trois foyers de personnes âgées alimentés par la cuisine centrale n’ont pas été touchés. Probablement parce que les pensionnaires ont mangé en hors-d’oeuvre des betteraves rouges cuites, qui n’avaient pas la même provenance que celles servies aux enfants. « Nous fabriquons 800.000 repas par an. C’est la première fois que ça nous arrive », déplore Christophe Bouillaux, directeur de la restauration municipale.

« Nous avons immédiatement demandé aux services de la Direction départementale des populations (ex-direction des services vétérinaires), et à un laboratoire indépendant (l’Adra de Quimper) d’effectuer des analyses », poursuit Yann Siz, très embarrassé par les résultats obtenus dans le courant de l’après-midi du mardi 11 mai. « Les résultats des analyses des deux laboratoires sont surprenants : d’un point de vue microbiologique et bactériologique, tout ce que nous avons servi est conforme à la législation ! Bien entendu, cela ne nous satisfait pas, car 300 enfants ont bien eu un pépin. Nous devons donc savoir exactement ce qui s’est passé », indique le responsable, qui a demandé des analyses complémentaires, attendues dans une quinzaine de jours.

L’élu risque cependant d’être déçu. En effet, en France, entre 2001 et 2003, il y a eu chaque année 600 foyers touchés par des Toxi-Infections Alimentaires Collectives (TIAC) [[Enquête InVS, Janvier 2006 G. Delmas, F. Le Querrec, F-X. Weill, A. Gallay, E. Espié, S. Haeghebaert, V. Vaillant]]. Or, le germe en cause a été retrouvé seulement dans 46% des foyers, et 25% à partir de prélèvements alimentaires. Dans 31% des cas, l’agent n’a pas été prouvé, mais il a été suspecté par les données cliniques et épidémiologiques. L’Institut de Veille sanitaire (InVs) indique que la restauration collective est de loin l’endroit majoritaire où ces intoxications ont lieu (77%), dont 35% en milieu scolaire et 19% en restauration commerciale, avec une moyenne de seulement 18 malades par foyer. Alors que celle de Lorient concerne plus de 400 personnes. « Lors de la précédente toxi-infection alimentaire collective d’importance – qui a concerné 303 personnes, ni l’agent ni l’aliment n’avaient été identifiés », note le Docteur Jean-Louis Thillier, directeur scientifique d’EuroscienceSanté, qui précise l’orientation permettant l’identification de l’agent pathogène. Celle-ci s’effectue selon trois critères :

A – le délai de survenue. Court (inférieur à 6h) pour le Staphylocoque doré et le Bacillus Cereus ; moyen pour la salmonelle et le Clostridium perfringens (12 à 36 h) et pour le Yersinia (24 à 36 h) ; et long pour le Campylobacter (2 à 5 jours) et les virus (36 h à 7 jours).

B – les signes cliniques principaux. Pour le Staphylocoque doré (identifié par la culture de l’aliment suspect ou des vomissements), il s’agit de nausées et vomissements, diarrhée liquide profuse non sanglante, douleurs abdominales, absence de fièvre. Pour le Clostridium perfringens et les bactéries sporulées thermorésistantes (identifiés par la culture de l’aliment suspect), les signes cliniques sont : diarrhée liquide, douleurs abdominales, absence de fièvre, de nausée et de vomissement. Pour le Bacillus Cereus (isolement dans l’aliment responsable), on note des nausées et vomissements, une diarrhée non sanglante brève, des douleurs abdominales, des céphalées (douleurs locales ressenties au niveau de la boîte crânienne) et une fébricule (petite fièvre). Le Campylobacter, l’E. Coli, l’Yersinia et les virus peuvent faire apparaître une fièvre, tandis que des troubles neurologiques peuvent signaler le Clostridium botulinum.

C – l’aliment contaminant. On retrouve les Salmonelles enteritidis dans les œufs et les produits dérivés (mousse au chocolat, pâtisserie, mayonnaise) ; le typhimurium dans viande (congelée) et volailles ; le Staphylocoque doré dans le lait et produits laitiers et les plats ayant nécessité des manipulations ; l’Histamine dans le poisson (thon, maquereau) ; le Bacillus Cereus dans la viande, la volaille et le riz frit ; et enfin le Clostridium perfringens dans les plats en sauce.

Ainsi, en ce qui concerne l’origine de la TIAC de Lorient et en fonction des critères rappelés par le Dr Thillier, le staphylocoque doré semble être le candidat le plus sérieux, avec comme éventuelle seconde piste celle d’un virus. Après avoir mis en œuvre tous les moyens d’identification, en particulier les mises en cultures et les études sérologiques, on devra ensuite trouver la faille dans l’assurance qualité de la filière Bio de la ferme à la cantine.

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