N’en déplaise à l’agronome de la Fondation Nicolas Hulot Marc Dufumier, qui désire orienter l’agriculture française vers une production « plus artisanale » (et dont les débouchés seraient les collectivités locales), les exportations de céréales françaises ont encore un bel avenir ! C’est en tout cas ce que vient de rappeler le président du Conseil spécialisé de la filière céréalière de FranceAgriMer, Rémi Haquin. « La demande mondiale en blés meuniers est telle qu’il n’est pas impossible de porter à 11,5 millions de tonnes le volume total de nos exportations de blé sur pays tiers », indique le spécialiste, auteur « à titre personnel » d’un billet d’humeur sur l’indispensable « nécessité du progrès génétique et de l’innovation scientifique ».
« Il y a trois ans, nous étions absents du marché égyptien. Avec 1,5 million de tonnes de contrats, nous sommes aujourd’hui de très loin son premier fournisseur en blé », note Christian Vanier, directeur Animation des filières de FranceAgriMer. Ce retournement de situation résulte bien entendu de l’absence – certes provisoire – de la Russie et, dans une moindre mesure, du retrait partiel de l’Ukraine et du Kazakhstan des marchés internationaux. La France a fourni la moitié des achats de blé du GASC égyptien, organisme public d’achat (suivie de très loin par les Etats-Unis avec 885 000 tonnes). L’Egypte n’est pas le seul pays à consommer des céréales françaises : cette année, l’Algérie a déjà acheté 930 000 tonnes, le Maroc 380 000 tonnes, l’Afrique Noire 360 000 tonnes, le Yemen 250 000 tonnes, la Libye 65 000 tonnes. Et même Cuba, avec 50 000 tonnes, fait partie des clients de la France ! Une aubaine pour la filière, ces ventes se faisant à un prix très attractif, qui pourrait bien rester élevé encore un certain temps.
Bien que la FAO ait récemment rappelé qu’il n’y a « pas de crise alimentaire mondiale à l’horizon », le marché mondial demeure en effet très tendu, comme en témoigne la forte réaction à la hausse des marchés (plus 6% pour le maïs et 9% pour le blé en une seule séance) face à la simple révision à la baisse de la production de maïs aux Etats-Unis ( – 13 Mt). « La position de la FAO tient au fait qu’en théorie, les disponibilités mondiales devraient suffire à faire face aux besoins. Le manque de 21 millions de tonnes de blé qui résulte du différentiel entre ce que les pays de la mer Noire ont exporté l’année dernière et cette année (14,5 millions de tonnes contre 36 Mt l’année dernière) pourrait en théorie être comblé. Mais cela suppose trois choses : que les problèmes de logistique et d’acheminement de l’Australie soient résolus, que la qualité des blés canadiens et des Etats-Unis soit à la hauteur, et qu’il n’y ait pas de nouvelles surprises climatiques dans l’hémisphère sud, où les récoltes n’ont pas encore été effectuées », tempère Michel Ferret, chef du service Marchés et études filières de FranceAgriMer.
Au final, les exportations de blés pourraient bien générer un chiffre d’affaires de plus 2 milliards d’euros (calculé sur un prix moyen de 200 euros la tonne) au bénéfice de notre balance commerciale. Ce qui représente l’équivalent de la vente de quarante A320. Et permet surtout de satisfaire les besoins alimentaires de… 50 millions de personnes
[[Chiffre calculé sur la base d’une consommation annuelle de 240 kg en équivalent blé (direct et indirect) par habitant, comme c’est le cas en Afrique du Nord et au Proche Orient.]] !