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Greenpeace découvre enfin le bon usage des essais OGM en plein champ !

La parution simultanée de deux informations en apparence reliées – à savoir la suspension provisoire d’un maïs OGM en Allemagne et les conclusions d’une étude réalisée par Greenpeace – a été savamment médiatisée afin d’entraîner le nouveau ministre de l’Environnement, Alain Juppé, dans un conflit direct avec la ministre de l’Agriculture, Christine Lagarde. Ainsi, dans un entretien paru le 25 mai 2007 dans Le Parisien, Alain Juppé aurait déclaré que « l’Allemagne vient de suspendre l’autorisation du MON 810 » de Monsanto, précisément au moment où « l’on vient de découvrir que la sécrétion de la toxine qui est censée tuer l’insecte qui attaque le maïs se passe dans des conditions qui ne sont pas exactement celles qu’on attendait ».

Immédiatement reprise par l’AFP, cette double déclaration a circulé dans les principaux médias, laissant même entendre que le ministre pourrait s’inspirer de la décision allemande pour « décréter un moratoire ». Diverses associations ont profité de cette effervescence médiatique pour mettre Alain Juppé sous pression. Ainsi, Agir pour l’environnement a réagi en exigeant que « le nouveau ministre de l’Ecologie agisse avec célérité ». La Coordination rurale a elle déclaré « apporter son soutien à Monsieur Alain Juppé, qui envisage de suspendre l’autorisation de cultiver les maïs génétiquement modifiés MON 810 », tandis qu’Arnaud Apoteker, de Greenpeace, s’est félicité de l’annonce du ministre, qu’il a qualifiée d’« excellente nouvelle à condition d’aller très vite ».

C’est en effet aller un peu vite. Comme l’a vérifié Marc Mennessier, journaliste au Figaro, « M. Juppé a fait savoir par son entourage qu’il entendait “s’inspirer de l’exemple allemand davantage sur la méthode, qui consiste à examiner les problèmes lorsqu’ils se posent, que sur le fond de la décision elle-même” ». Des propos confirmés par Christine Lagarde, qui a déclaré sur la radio BFM : « Il ne faut pas se précipiter. Il faut donner le temps de la réflexion avant une décision ». En conséquence, la Direction générale de l’alimentation, qui dépend du ministère de l’Agriculture, a saisi la Commission du génie biomoléculaire, lui demandant de rendre un avis pour le 12 juin. D’ici là, aucun moratoire sur le maïs OGM MON 810 ne peut, bien entendu, être décrété.

D’autant plus qu’en Allemagne, il n’est pas du tout question d’un moratoire sur le maïs MON 810, mais d’une suspension provisoire sans conséquence pour les semis de l’année 2007. En outre, cette suspension n’a strictement rien à voir avec la publication du document de Greenpeace. Elle fait suite à une injonction adressée le 27 avril 2007 à Monsanto par le Bureau fédéral de protection du consommateur et de la sécurité alimentaire (BVL), et qui demande essentiellement la mise en place d’un plan de surveillance, « nécessaire dans le cadre de la procédure européenne de prolongation de l’autorisation ». Celui-ci doit apporter des réponses à une série d’interrogations soulevées par diverses publications scientifiques, principalement en rapport avec l’impact potentiel de la toxine sur les organismes non-cibles. Il doit permettre la poursuite des semis de maïs MON 810 l’année prochaine.

Nulle part l’injonction ne mentionne le document de Greenpeace, qu’il est difficile de qualifier d’étude scientifique dans la mesure où il n’a pas été publié dans la moindre revue à comité de lecture. Ce document n’apporte d’ailleurs rien de nouveau. En effet, il ne fait que constater des résultats déjà mis en évidence par l’équipe de H.T. Nguyen et J.A. Jehle, du Laboratoire pour la recherche en biotechnologie de Neustadt an der Weinstrasse (Allemagne), publiés en avril 2007 dans le Journal of Plant Diseases and Protection 1. L’étude allemande montre que le maïs MON 810 sécrète la toxine Bt de façon variable selon les saisons, les parcelles ou le stade de développement. Elle a été réalisée sur 1 085 échantillons récoltés en 2001, 2002 et 2003, sur 2 sites, alors que les 619 échantillons de Greenpeace ne concernent que l’année 2006, et ont été prélevés sur 12 sites. L’existence même « d’une telle variabilité ne surprend pas les biologistes, » a déclaré Denis Bourguet, chercheur à l’Inra de Montpellier, au quotidien Le Monde.

En revanche, ce qui est intéressant, c’est l’aveu explicite de Greenpeace selon lequel il est impossible d’évaluer correctement l’efficacité d’un OGM uniquement en laboratoire ou sous serre. Doit-on en déduire que l’association écologiste a enfin compris l’importance des essais en plein champ ?

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