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L’AMM du Cruiser pour un an serait le fruit une perfide ruse du ministère de l’Agriculture, estime Bernard Fau, l’avocat de l’Unaf

Le président de l’Union nationale d’apiculture française (Unaf), Henri Clément, le président de l’AGPM, Christophe Terrain, et le patron de Syngenta France, Denis Tardy, partagent une seule et même conviction : l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de l’insecticide Cruiser n’aurait pas dû être accordée pour un an, mais pour dix.

C’est ce qu’a indiqué Maître Bernard Fau lors d’une conférence de presse tenue par l’Unaf le 17 février 2010 à l’Assemblée Nationale. Affirmant que « le texte du code rural qui prévoit les autorisations est un texte impératif », et donc que les « autorisations de mise sur le marché doivent être accordées pour 10 ans », l’avocat de toutes les causes apicoles considère erronée la lecture du code rural faite par le ministre de l’Agriculture. « Le ministre l’interprète dans un autre sens, puisqu’il estime qu’il s’agit d’une durée maximum, en dessous de laquelle il peut délivrer des autorisations de moins longue durée », a expliqué Bernard Fau à la presse. Toujours selon l’avocat, le système de dix ans est logique puisqu’avant de délivrer une autorisation, il faut préalablement avoir démontré l’innocuité du produit. « Cette démonstration d’innocuité permet au produit de se trouver sur le marché pendant un certain temps, ce qui représente une garantie à la fois pour le fabricant et pour les acteurs de la vie environnementale », a-t-il indiqué.

Pourquoi alors avoir réduit la durée de l’AMM à seulement un an, et ceci pour la troisième année consécutive ? L’avocat croit y voir une perfide ruse, mise au point par les très habiles fonctionnaires de la rue de Varenne. En effet, en accordant une durée d’un an seulement, aucun recours devant le Conseil d’Etat ne peut aboutir, déplore Maître Fau, qui souligne que le temps d’instruction d’« un recours porté devant une juridiction administrative tel que le Conseil d’Etat a une durée plus longue qu’une année. En conséquence, chaque AMM attaquée est arrivée à terme avant même que le conseil d’Etat puisse statuer sur sa légalité ». Accorder une AMM d’un an représente donc « une pratique administrative qui permet de rendre à néant le “contrôle démocratique“ par les acteurs de la vie civile», conclut l’avocat de l’Unaf.

Absurde, rétorque-t-on du côté du ministère de l’Agriculture. Comme l’indique son communiqué de presse, cette autorisation a été limitée à un an « compte tenu des inquiétudes exprimées par plusieurs syndicats professionnels apicoles au cours des dernières années », dont l’Unaf ! Selon des sources proches du dossier, Bruno Le Maire envisageait même d’accorder une AMM de dix ans à l’insecticide de Syngenta. S’appuyant sur l’avis favorable de l’Afssa et sur deux ans d’expérience, le ministre avait en effet toutes les cartes en main pour constater qu’une cohabitation pacifique entre cet insecticide et les abeilles est parfaitement possible. En réalité, la décision de restreindre l’AMM à un an résulte d’un arbitrage avec entre autres le ministère de l’Environnement. Ayant consulté les associations écologistes et les apiculteurs, ce ministère jugeait ce choix politiquement plus prudent. Ce qui est plutôt raté puisqu’il permet à l’Unaf de crier au scandale et  de saisir pour la troisième année consécutive… le Conseil d’Etat ! Curieuse décision au regard de la brillante présentation de Maître Fau, qui consistait précisément à expliquer pourquoi un tel recours est inutile…

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