Cette année, les pertes de récolte des olives atteignent jusqu’à 80% ! C’est le pire désastre depuis 1956, année où le gel a détruit l’oliveraie française. « Alors qu’on s’attendait à récolter environ 5 000 tonnes d’huile d’olive, nous ne sommes même pas certains de pouvoir rentrer 1500 tonnes », déplore Olivier Naslès, le président de l’Association française interprofessionnelle de l’olive (Afidol). Un constat que partage la Coordination rurale, qui relève que « certains vergers ont perdu l’intégralité de leur récolte ». En cause : bactrocera oleae, la mouche de l’olivier, un ravageur qu’on connaît pourtant parfaitement, car il est présent sur le continent européen depuis plus de cinquante ans ! L’hiver clément suvi d’un début d’été pluvieux ont provoqué la prolifération massive de ce petit ravageur, observée cette année jusqu’aux vergers les plus reculés et habituellement à l’abri. « Lors d’une année normale, sur une semaine, on relève en moyenne 30 mouches sur chaque piège qu’on pose. Cette fois-ci, on en a trouvé plus de 300 », note Alain Libérato, producteur d’olives à Mouriès (Bouches-du-Rhône). En traitant l’ensemble de son oliveraie bio de 13 hectares avec de l’argile, il a pourtant suivi à la lettre les bons conseils de la filière. « J’ai utilisé de l’argile, qui crée une barrière et repousse la mouche. C’est bien meilleur que les pesticides. Mais là, à chaque fois qu’on pulvérisait, il pleuvait juste après. » Résultat, il estime n’avoir pu sauver qu’à peine « 20% d’une récolte normale ». Avec des pertes assez similaires, les producteurs d’olives conventionnelles ne sont toutefois pas mieux lotis. Dans le Gard, on parle de 40 à 60% de pertes, et dans l’Aude, jusqu’à 80 % . « On devrait atteindre tout juste 150 tonnes [contre 700 tonnes habituellement] », note Jean-Bernard Gieules, président du syndicat oléicole du Pays d’Aude (250 producteurs).
« Dans ce contexte particulier, il aurait fallu positionner un traitement tous les dix à quinze jours, soit entre 6 et 8 traitements sur la période », estime Olivier Naslès. Or, depuis 2011, la règlementation interdit de dépasser 2 traitements par hectare et par an, contre 5 ou 6 traitements auparavant. Le cadre règlementaire actuel a ainsi montré toutes ses limites. Comble de l’absurde, « la France est le seul pays européen à avoir cette restriction », souligne Jean Pierre Decor, producteur d’olives dans le Minervois. « Nous avions pourtant les moyens de limiter ces dégâts », déplore Olivier Naslès. Certains producteurs n’ont d’ailleurs pas hésité à prendre quelques libertés avec la règlementation afin de sauver leur récolte. « Ce qui arrive à l’oléiculture, qui n’est qu’un détail de l’agriculture francaise, devrait amener nos dirigeants à se poser les bonnes questions avant de faire de l’écologie de salon », regrette le président de l’Afidol. Il n’a pas tort.