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EELV au bord de la faillite

La liste des défections qui secouent Europe Écologie Les Verts (EELV) ne cesse de s’allonger : outre les sept parlementaires déjà démissionnaires (Noël Mamère, Marie Christine Blandin, Jean-Vincent Placé, Barbara Pompili, Christophe Cavard, Isabelle Attard et François de Rugy), d’autres candidats au départ se profilent à l’horizon, comme le député François-Michel Lambert, déjà suspendu du parti. Et cette hémorragie ne touche plus seulement les élus nationaux, comme en témoignent les départs actés ou prévus de très nombreux élus locaux et régionaux. En tout, un peu plus de 1000 personnes ont déjà quitté EELV, dont un tiers sont des élus, « qui reversaient 15% de ce qu’ils gagnaient au parti […], soit une perte annuelle de 300000 euros », note le Canard Enchaîné.

Qu’est-ce qui pousse au départ autant de membres d’EELV ? Certains d’entre eux auraient découvert le côté intolérant de leur ancien parti. C’est le cas de Christophe Cavard, qui déplore que « l’esprit sectaire [ait] gagné EELV », ou de François de Rugy, qui estime ne plus pouvoir avoir de débats « ni sur le fond ni sur la stratégie, au sein d’un parti qui s’enfonce dans une dérive gauchiste, [voire] dans un repli sectaire ». Encore plus sévère, Isabelle Attard, plutôt à gauche du parti, a quitté le navire en s’en prenant à « l’oligarchie [d’un] parti vidé de son sens ».

Dans sa toute récente lettre de démission, Christophe Rossignol, un ancien haut responsable d’EELV qui a consacré dix-sept années de sa carrière politique aux Verts, ne mâ- che pas davantage ses mots : « Je ne comprends plus mon parti. La lente agonie d’EELV s’est accélérée avec le départ du gouvernement. […] Et aujourd’hui, en Nord-Pas-de-Calais-Picardie, demain sans doute en PACA, deux régions où le FN peut gagner, quelques dizaines d’adhérents ont décidé de mettre en place une stratégie mortifère de désunion qui risque pour des millions de personnes de se transformer en tragédie. […] Cette décision est insupportable. » À l’origine de sa démission : l’explosion du groupe écologiste du conseil régional de Picardie, survenue suite à la fronde menée par le militant radical François Veillerette, ancien dirigeant de Greenpeace et patron de l’association Générations Futures, et partisan, comme Cécile Duflot, d’un rapprochement d’EELV avec le Front de gauche. « Le seul sujet qui obsède les cadres du par- ti, c’est de faire perdre le PS pour mieux se faire respecter », analyse avec raison Christophe Cavard, qui est persuadé que ce choix stratégique fera « gagner la droite et l’extrême-droite ».

En politique comme dans son travail associatif, François Veillerette cache en effet difficilement son caractère radical. Disciple assumé de Teddy Goldsmith, François Veillerette porte la version moderne (c’est-à-dire de gauche) de l’utopie écolo-conservatrice parfaitement décrite dans l’ouvrage du militant écologiste franco-britannique Changer ou disparaître ? (1972). Pour Goldsmith, le crime, la drogue, la délinquance, l’alcoolisme et les maladies mentales étaient, pour la plupart, imputables aux méfaits de l’« homme industriel ». Tout comme la mobilité moderne, qui aurait désintégré la cohésion sociale. Face à ce constat, Teddy Goldsmith prônait « une décentralisation politique et économique à tous les niveaux, et l’organisation de communautés de taille assez réduite pour être dans une large mesure autorégulatrices et autarciques ». Avec en prime une politique de régulation démographique. Un tel programme étant parfaitement incompatible avec celui du PS, il est tout naturel que François Veillerette participe, avec les éléments les plus gauchistes d’EELV, à la chute programmée du président Hollande.

Mais encore faut-il que le parti de Cécile Duflot en ait les moyens financiers ! Or, comme en témoigne un document interne qu’A&E a pu se procurer, EELV est littéralement en faillite : les résultats négatifs cumulés des années précédentes s’élevaient en effet à –5175490 euros au bilan 2012 ! Et si la situation s’est légèrement améliorée en 2013 et en 2014, en raison « d’un financement public plus élevé », « il est très probable que le financement public issu de 2017 soit ramené à la situation d’avant 2012 [soit une baisse de 1 à 1,3 million d’euros], compte-tenu de la situation politique. »

Une situation qui empire

Du côté des comptes régionaux d’EELV, la situation –qui était plutôt bonne– s’est dégradée à partir de 2014. En cause : les mauvais résultats électoraux du parti, qui ont entraîné une diminution des reversements des élus suite aux municipales. Et la situation ne peut qu’empirer. « L’échéance de décembre 2015 va aggraver cette situation avec des pertes d’élus régionaux », prédit très justement le texte.

Plusieurs anciens membres d’EELV ont d’ailleurs déjà arrêté de payer leur parti. François de Rugy, Christophe Cavard, François-Michel Lambert et Jean-Vincent Placé doivent ainsi respectivement 11600, 11800, 13800 et 13500 euros à EELV. « Les démissionnaires ne sont pas les seuls à avoir une dette : le député EELV des Français de l’étranger, Sergio Coronado, doit 11 600 euros », note l’AFP.

Face à cette situation délicate, une « Motion pour redresser d’urgence les finances d’EELV » a été déposée par Jérôme Artaz, Danielle Estay et Hélène Pelletier. Ce texte prône une réduction des dépenses d’un million d’euros par an, avec licenciement de certains salariés. Il envisage aussi la vente du siège « pour libérer un actif permettant de rembourser la banque et les fournisseurs ». Et estime nécessaire de doubler le taux de cotisation des futurs élus régionaux.

Finalement, des mesures assez cohérentes avec le programme politique des écologistes, c’est-à-dire vente des actifs, plus de chômage et plus de taxes…

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