Après de longs mois d’attente, l’exécutif européen a enfin présenté les deux derniers piliers de son Green Deal : ceux concernant sa politique agricole et la biodiversité. Or, au prétexte de vouloir défendre une « croissance durable », l’équipe d’Ursula von der Leyen propose plutôt un projet de décroissance qui semble être une copie conforme tirée du programme agricole de l’aile la plus radicale de l’écologie politique. Surfant sur la crise du Covid-19, aujourd’hui invoquée – avec le réchauffement climatique – comme le nouveau prétexte pour tout changement, la Commission souhaite « prévenir l‘apparition de futures épidémies ». De ce fait, elle s’engage, sous couvert de perte de biodiversité, à réduire de 10 % la surface agricole européenne, alors que le Covid-19 est apparu… en Chine ! En ajoutant l’objectif d’une conversion de 25 % des terres agricoles en bio, alors qu’elles représentent aujourd’hui à peine 7,5 %, il restera de moins en moins de terres cultivables pour produire les denrées alimentaires indispensables à l’immense majorité des consommateurs européens. C’est-à-dire ceux qui ne se précipitent pas dans les magasins bio, surtout à la mode dans les centres urbains.
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Et ce n’est pas tout ! Voilà que la Commission s’engage également à procéder à une restriction drastique des moyens de production : 50 % de réduction pour « l’utilisation des pesticides et des risques qui leur sont associés », au moins 20 % de réduction pour l’utilisation de fertilisants, et une baisse de 50 % des ventes d’antimicrobiens utilisés pour les élevages et l’aquaculture. Comme elle reste silencieuse sur le rôle des nouveaux outils de sélections variétales (principalement l’édition génomique), on conçoit difficilement comment l’agriculture européenne pourrait devenir plus autonome, et répondre à la priorité affichée d’une « souveraineté alimentaire européenne ».
Cela n’a pas échappé aux producteurs de grandes cultures (AGPB, AGPM, CGB et FOP) qui, dans un communiqué de presse commun, estiment que « cette stratégie pourrait se traduire par une baisse de 30 % en moyenne des volumes de céréales, d’oléoprotéagineux et de betteraves sucrières », avec en valeur une baisse encore plus forte en raison des pertes de qualité et des risques sanitaires accrus.
Produire moins : tel est donc le nouveau credo de la Commission, qui semble ignorer que, si la Chine possède un stock de céréales pour faire face à ses besoins pendant un an, si la Russie et les États-Unis se sont assurés une sécurité alimentaire stratégique de 6 mois, l’Union européenne a de quoi tenir… 45 jours ! Contrairement à ce que sa posture pourrait laisser croire, l’équipe d’Ursula von der Leyen n’a donc tiré aucun enseignement de la crise du Covid-19.