Le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert aurait-il été désavoué par le président Macron sur ses arbitrages concernant le glyphosate? Telle est en tout cas l’opinion du journaliste de Libération Philippe Brochen, qui livre son analyse à travers un article intitulé « Bio et pesticides : double revers pour Stéphane Travert ». Dans ce dossier à rebondissements multiples, la voix de Stéphane Travert a en effet été éclipsée par celle de son collègue de la Transition écologique, le très médiatique Nicolas Hulot. Ainsi, les belles promesses du ministre de l’Agriculture en faveur d’un renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour une durée de «5 à 7 ans» se sont révélées n’être que des paroles sans suite.
Le refus du gouvernement français de voter en faveur de la proposition de la Commission européenne lors de la réunion du 9 novembre dernier en est la preuve définitive. Il envoie un signal très clair : l’Elysée souhaite une sortie du glyphosate, à l’instar de ce que prônent les ONG écologistes. « L’enjeu n’est pas de statuer sur 3, 5 ou 10 ans de renouvellement mais bien de recentrer le débat sur la nécessité d’une proposition allant vers une interdiction progressive, accompagnée de mesures restrictives », résume ainsi Greenpeace dans un communiqué de presse. C’est d’ailleurs ce que clame haut et fort Nicolas Hulot lorsqu’il affirme que «le grand changement, c’est qu’on est dans un objectif de sortie, et pas simplement de reconduction. […] La France est en pointe sur ce sujet-là ».
En réalité, au-delà du glyphosate, tous les produits phytosanitaires sont désormais dans la ligne de mire du gouvernement. « On va s’affranchir de toutes ces molécules qui de manière assez justifiée occasionnent une défiance entre le consommateur et le mode alimentaire», a encore martelé le porte-parole écologiste d’Emmanuel Macron, Nicolas Hulot.
Car, inutile de se voiler la face, c’est bien l’Elysée qui a lancé cette nouvelle offensive contre les pesticides. Pour s’en convaincre, il suffit de réécouter attentivement l’intervention du chef de l’Etat à Rungis le 11 octobre dernier. A l’instar de ce qu’il prône pour les autres secteurs industriels, Emmanuel Macron souhaite valoriser les filières de qualité (label rouge, bio, circuits courts, etc.) tout en abandonnant celles «protégées jusqu’ici et qui ne correspondent plus à nos goûts et nos besoins ». «Il existe des modèles productifs dans lesquels il n’y a pas d’avenir. Il faut que cela cesse», a prévenu le président. Supprimer petit à petit les produits phytosanitaires s’inscrit dans cet objectif.
Telle est donc la feuille de route des Etats Généraux de l’Alimentation, qui empruntent désormais le même chemin que celui du Grenelle de l’Environnement : un lamentable jeu de rôles laissant croire à un débat citoyen alors que l’acte final est déjà écrit. Hormis quelques aménagements sympathiques pour le monde agricole, les résultats seront en réalité tout aussi dévastateurs, entrainant une mise à mort progressive de notre modèle agricole. Cela engendrera inexorablement une explosion des importations de denrées agricoles, la progression des importations de volailles dans la consommation en France n’étant que le signe précurseur de ce désastre annoncé. S’élevant à moins de 10% en 2000, elles dépassent aujourd’hui les 40%. Et ce n’est qu’un début…