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Pesticides : un rapport rassurant sur les produits agricoles passé sous silence

Alors que Générations Futures communique sur les dangers des pesticides, l’Efsa vient de rendre public son rapport annuel constatant, une fois de plus, que l’alimentation proposée aux consommateurs est parfaitement saine et sans risque

Confinement oblige, l’association Générations Futures (GF) a été forcée de reporter sine die les nombreuses activités prévues pour sa 15e Semaine pour les alternatives aux pesticides, qui devait se dérouler du 20 au 30 mars. Financée par le lobby du bio, cette manifestation aux multiples facettes entend démontrer qu’il est possible de « se passer des pesticides chimiques de synthèse dans notre consommation et notre production ». Et cela par le biais de conférences, ciné-débats, portes ouvertes de fermes, dégustations, ateliers, ainsi que de spectacles en tout genre. Pour le cru 2020, GF a donc dû se contenter d’une « édition 100% en ligne », sans pour autant se départir de son leitmotiv : la promotion de l’agriculture biologique sous toutes ses formes, censée procurer une alimentation saine aux citoyens.

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Le modus operandi de l’association n’a pas varié depuis quinze ans : d’abord, diffuser des propos anxiogènes sur les pesticides afin de faire paniquer le consommateur, pour mieux le rassurer ensuite grâce à la promotion des bons produits de ses propres sponsors, à savoir les grands noms de la distribution de denrées issues de l’agriculture biologique.

Plus de 90000 analyses de contrôle

Ce discours anxiogène tranche avec les rapports publiés par l’Efsa (l’Autorité européenne de sécurité des aliments) concernant les résidus de pesticides présents dans l’alimentation. En effet, chaque année, l’Union européenne coordonne une vaste campagne de contrôle menée au niveau national par les États membres, comprenant à la fois un échantillonnage ciblé (80 000 échantillons) et aléatoire (11 679 échantillons). Avec des résultats plus que rassurants. Ainsi, dans l’édition de 2018, rendue publique le 2 avril 2020, 98,6% des échantillons de la collecte aléatoire avaient des résultats d’analyse en dessous des limites autorisées (LMR), et 96,4% pour les échantillons de la collecte ciblée, dont 60% avaient même des résultats en dessous de la limite de quantification (LQ). C’est-à-dire que grosso modo pour la moitié des aliments, il n’y a strictement aucune différence entre production bio et conventionnelle.

Mais quid des 40 % de produits contenant des traces de pesticides ?

D’une part, présence ne veut pas dire danger, d’où l’existence même des LMR, qui constituent avant tout une norme administrative, calculée en fonction de multiples critères, y compris la Dose journalière admissible (DJA), qui est, elle, en revanche, une norme sanitaire. Et il y a toujours entre la LMR et la DJA un facteur de précaution d’au moins 1000.

Regard sur les produits bio

D’autre part, les produits bio eux- mêmes sont loin d’être sans traces de pesticides. En effet, sur les 5735 analyses effectuées, 15,2 % contenaient des résidus de pesticides. L’Efsa précise que, pour 794 de ces échantillons, il s’agit de résidus quantifiés en dessous des LMR (certes, en légère hausse : 13,8 % en 2018 contre 12,2% en 2017), tout en actant que 78 échantillons ont été déclarés avec des niveaux de résidus supérieurs à leurs LMR correspondantes.

Il faut à nouveau souligner que, tout comme pour les produits conventionnels, la présence de traces de pesticides autorisés en AB (comme le cuivre, le spinosad, l’azadirachtine et les pyréthrines) en dessous de leur LMR respective n’a rien d’inquiétant. « La présence de résidus de ces
composés étant liée aux pratiques agricoles autorisées en agriculture biologique dans l’Union, les mesures positives de ces substances dans les aliments biologiques ne sont pas inattendues
», notent ainsi les auteurs du rapport.

Présence de produits interdits

En revanche, il en va tout autrement pour les produits non autorisés en AB, notamment le chlorpyrifos, l’imazalil, la nicotine ou encore le thiaclopride. L’Efsa avance plusieurs hypothèses concernant ces curieuses contaminations : « La présence d’autres pesticides non autorisés en agriculture biologique peut – comme pour les produits conventionnels – être le résultat d’une dérive de pulvérisation, de contaminations environnementales ou décontaminations lors de la manipulation, de l’emballage, du stockage ou de la transformation des produits biologiques. »

Mais l’Efsa s’interroge également sur un éventuel caractère frauduleux de ces produits : « Cet événement pourrait également être lié à l’étiquetage des aliments produits de façon conventionnelle étiquetés comme aliments biologiques. »

L’Efsa demande aux États membres « d’essayer d’élucider les raisons de la présence de pesticides trouvés occasionnellement dans les aliments biologiques et qui ne sont pas autorisés dans cet type de produits

Et de demander aux États membres « d’essayer d’élucider les raisons de la présence de pesticides trouvés occasionnellement dans les aliments biologiques et qui ne sont pas autorisés dans ce type de produits ».

Au regard du lobbying particulièrement actif des acteurs de l’agriculture biologique, il n’est toutefois pas certain qu’une telle enquête voie le jour.

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