AccueilEditoLes agriculteurs ont-ils eu raison de manifester contre l’Anses ?

Les agriculteurs ont-ils eu raison de manifester contre l’Anses ?

Dès le matin du 28 novembre, des agriculteurs de la FNSEA d’Île-de-France et des JA se sont rendus devant les locaux de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) afin d’organiser son « déménagement symbolique à Bruxelles ». « Nous souhaitons que l’Anses arrête de contredire les réglementations européennes », a déclaré à l’AFP Cyrille Milard, président de la FDSEA 77. Notant que « les agriculteurs ont exprimé leurs attentes immenses vis-à-vis de la recherche et des scientifiques pour trouver des solutions aux défis gigantesques de notre agriculture », l’ancienne ministre de l’Agriculture avait plutôt apporté un soutien implicite à cette action.

Il est vrai qu’à ce moment-là, Annie Genevard avait déjà dans sa besace le texte d’un décret, qui allait être présenté le lendemain, lors d’un déplacement. Celui-ci mettait en place un Conseil d’orientation pour la protection des cultures, censé réunir les agriculteurs, les instituts de recherche et les fabricants de produits phytosanitaires, pour « prioriser l’instruction » par l’Anses des demandes d’autorisation en fonction des besoins des différentes filières agricoles. Comme l’indiquent les services du ministère, il ne s’agissait pas de reprendre les rênes de l’agence, et encore moins de dicter ses décisions, mais bien de faciliter l’accès aux produits phytosanitaires, notamment lorsque ceux-ci ont déjà obtenu une AMM dans d’autres pays de l’Union européenne.

Chapeau ! Sauf qu’on peut raisonnablement se demander à quoi va servir ce nouveau conseil, puisque les questions qu’il se propose de traiter sont déjà parfaitement connues et identifiées. Ainsi, de nombreux dossiers de reconnaissance mutuelle, notamment pour la filière légumes, ont été refusés par l’Anses au simple motif qu’il y manque une étude spécifique estimée indispensable par l’agence, alors qu’elle n’est pas exigée par les autres agences sanitaires européennes, qui, elles, appliquent la ligne directrice européenne reconnue dans la zone Sud. Autre problème : l’Anses refuse que le demandeur d’AMM fournisse des études complémentaires après le dépôt du dossier. Or, cette pratique est parfaitement autorisée par les autres agences.

En réalité, le problème que pose l’Anses est autrement plus profond que ces formalités administratives, puisque son évaluation des risques, au demeurant particulièrement poussée, n’est jamais contrebalancée par une évaluation des bénéfices autres que purement techniques (sanitaires, économiques et sociétaux), domaine qui est hors de sa mission. D’où l’impérieuse nécessité pour le pouvoir politique de reprendre la main sur des décisions qui doivent tenir compte de ces deux aspects.

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