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NGT: divergences d’opinion au sein des socialistes européens

Alors que le PS français a rejoint le mouvement hostile aux nouvelles techniques génomiques, les dirigeants socialistes danois et espagnols ont clairement pris parti pour leur utilisation

Au moment où le Danemark, favorable aux nouvelles techniques génomiques (NGT), prend le relais de la Pologne à la présidence du Conseil de l’UE, Jacob Jensen, le ministre danois de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, a déclaré espérer boucler le dossier des NGT d’ici la fin de l’année 2025.

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Sans surprise, cela a donné lieu à une intensification du lobbying des opposants à ces nouvelles méthodes d’amélioration des plantes, pilotée par l’ensemble de la nébuleuse écologiste et la frange extrémiste de la gauche. Mais aussi par une partie des milieux conservateurs et populistes, tels les gouvernements de Hongrie et de Slovaquie, qui ont clairement manifesté leur opposition. Les députés socialistes français ont, hélas, pris le parti de rallier le camp des opposants aux NGT, à l’inverse des gouvernements socialistes d’Espagne et du Danemark qui, fidèles à l’esprit progressiste de la social-démocratie, militent en faveur de cette révolution biotechnologique. De même, le gouvernement travailliste britannique vient de promulguer une loi permettant la production de cultures obtenues par les technologies génétiques baptisées « sélection de précision ».

Au sein du PS français, on s’affiche « pour la science, pour le progrès ouvert à l’innovation », comme l’a encore affirmé l’eurodéputé socialiste Christophe Clergeau, tout en revendiquant, par la bouche du même député Clergeau, une franche hostilité aux « nouveaux OGM ». Ainsi, à la fin 2023, en tant que rapporteur fictif des socialistes au Parlement européen sur les NGT, celui-ci avait déposé près de 150 amendements visant à imposer des mesures d’encadrement contraignantes pour endiguer leur essor.

— Lire aussi : L’eurodéputé Christophe Clergeau au cœur du lobbying anti-NGT

Les députés socialistes français ont, hélas, pris le parti de rallier le camp des opposants aux NGT, à l’inverse des gouvernements socialistes d’Espagne et du Danemark

L’Espagne mise sur les NGT

Un positionnement qui diverge radicalement de celui du ministre espagnol de l’Agriculture, Luis Planas, membre du Parti socialiste ouvrier espagnol, qui, le 12 mai dernier, prononçait, en ouverture d’une conférence à Madrid sur les avancées des nouvelles techniques génomiques, un vibrant plaidoyer en faveur des NGT.

Le ministre espagnol y soulignait notamment l’importance des NGT : « Nous devons continuellement intégrer l’innovation pour répondre aux besoins croissants d’un point de vue quantitatif mais aussi qualitatif en ce qui concerne notre alimentation plus saine et plus durable », estimant que « la biotechnologie joue un rôle crucial ». « Le fait que nous disposions de cultures dont les plantes et les semences sont plus résistantes aux parasites, aux maladies et aux conditions climatiques défavorables, et dont la productivité, la qualité nutritionnelle et la durée de conservation sont plus élevées est absolument fondamental », assurait-il, en rappelant que « tout comme les technologies progressent, nous devons être capables, à partir de la sphère publique, de progresser dans l’environnement réglementaire qui les encadre et d’être en mesure de suivre ces progrès scientifiques et technologiques ».

Et il concluait sur une note très pragmatique : « Le monde n’attend pas, le monde tourne et nous devons être capables de répondre à ses défis ; d’autres pays ou groupes de pays l’ont déjà fait, ils développent et utilisent ces technologies. » Pour le ministre de l’Agriculture, il est donc essentiel que l’Espagne ne rate pas le train des biotechnologies végétales : « Je le dis très clairement, l’Espagne a beaucoup d’ambition en ce qui concerne la réglementation des NGT, et nous n’allons pas accepter ou défendre une position qui ne représente pas un progrès clair pour l’avenir immédiat. »

Les NGT au service de la biodiversité

Le Danemark, à la présidence de l’Union européenne depuis le 1er juillet, est lui aussi connu pour son ouverture aux innovations des biotechnologies végétales.

Il existe à Copenhague un large consensus politique en faveur d’une législation européenne adaptée aux NGT considérés comme nécessaires aux adaptations de l’agriculture

Sa Première ministre socialiste, Mette Frederiksen, et son gouvernement de coalition n’ont ainsi jamais mis de freins au développement des NGT. Bien au contraire, il existe à Copenhague un large consensus politique en faveur d’une législation européenne adaptée aux NGT, considérées comme un outil parmi d’autres pour faire face aux nécessaires adaptations de l’agriculture. Le ministre de l’Agriculture danois a ainsi expliqué au site Agriwatch : « Il ne s’agit pas de changer la météo, car nous ne le pouvons pas, mais nous pouvons offrir à l’agriculture en général, et donc au secteur alimentaire, de meilleures possibilités de faire face au changement climatique et à la sécheresse, ce que ces nouvelles techniques génomique permettent de faire. » En l’accord « tripartite vert », scellé en juin 2024 par le gouvernement danois avec les principaux groupes industriels, agricoles et environnementaux du pays, « visant à réduire les émissions de carbone dues à l’agriculture et à restaurer la nature ». Cet accord prévoit notamment que « plus de 15 % des terres arables exploitées aujourd’hui seront converties en forêts et en espaces naturels d’ici à 2045 », ce qui implique de produire davantage sur moins de surface. Les biotechnologies végétales sont nécessaires pour atteindre cet objectif, estime le gouvernement danois qui, résolument volontariste, a conclu un accord de principe, en juin 2024, avec la Fondation Novo Nordisk, liée à l’entreprise de biotechnologie Novonesis, qui allouera 10 milliards de couronnes (environ 1,3 milliard d’euros) à la conversion de terres au Danemark « afin de créer de l’espace pour plus de nature et de biodiversité et pour une production agricole basée sur des technologies modernes ».

Les travaillistes britanniques ouvrent la voie aux NGT

Outre-Manche, avec les travaillistes britanniques qui occupent à nouveau Downing Street, les biotechnologies végétales ont aussi le vent en poupe.

Ainsi, le Royaume-Uni est désormais le premier pays d’Europe à autoriser la production commerciale et la commercialisation de cultures obtenues par sélection de précision. La législation secondaire nécessaire à la mise en œuvre complète de la loi de 2023 sur les technologies génétiques (sélection de précision) a été votée le 13 mai, et, quelques jours plus tard, le ministre à la Sécurité alimentaire et aux Affaires rurales, le travailliste Daniel Zeichner, a promulgué les règlements sur les technologies génétiques de 2025.

Ces règlements, qui devraient entrer en vigueur à l’automne, permettront le développement de cultures issues des NGT mais uniquement dans la mesure où celles-ci présenteront des caractéristiques qui auraient pu se produire naturellement ou par le biais de la sélection traditionnelle. En juillet 2024, le ministère de Zeichner avait déjà engagé un plan de soutien de cinq ans aux réseaux d’amélioration génétique des cultures « afin d’améliorer les principales variétés de cultures britanniques et de renforcer la sécurité alimentaire du Royaume-Uni ». Ce programme, dans lequel son ministère finance notamment « l’utilisation de la sélection de précision pour débloquer l’innovation dans la sélection des cultures », cible les principales cultures britanniques, à savoir les oléagineux, les légumineuses, les fruits à baies, les légumes et le blé.

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