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Entretien avec Dominique Bourg

Cet entretien fait suite à l’article  » Dominique Bourg ou le syndrome de la finitude » paru dans le numéro 85 – Octobre 2010 – de la revue a&e.

Dominique Bourg, philosophe, explique sa vision de l’agriculture de demain et sa position au sujet des ogm.

Quelle est votre vision de l’agriculture de demain ?

Avec un futur énergétique beaucoup plus contraignant, le type d’agriculture qu’on connaît aujourd’hui, et qui nécessite d’investir dix calories pour en obtenir une seule, ne pourra pas perdurer. En outre, ce modèle pose d’autres problèmes, notamment avec les pesticides que l’on retrouve dans les sols. Je vois donc se dessiner deux tendances : l’orientation vers une agro-écologie, c’est-à-dire vers une agriculture qui prenne en compte le fonctionnement des écosystèmes, et, à moyen terme, une réallocation de main d’oeuvre aux tâches agricoles.

Qu’entendez-vous par agro-écologie ?

Il s’agit d’une agriculture qui utilise beaucoup moins d’intrants, beaucoup moins d’énergie, moins d’engrais et de produits phytosanitaires, et qui joue sur les mécanismes naturels afin de maintenir des rendements suffisants pour nourrir une population en croissance. Disposant de moins d’énergie, ce modèle agricole « consommera » naturellement beaucoup plus de main d’oeuvre.

Concrètement, qu’est-ce que cela impliquera pour un céréalier ?

Je ne peux pas répondre exactement. Ce que je peux dire, c’est qu’il y a un cadre général dans lequel vont s’exercer les cultures du maïs, du blé, etc., et qui ne sera plus celui que l’on connaît aujourd’hui. Ce que je vois par exemple, c’est le retour aux semis directs, ou encore l’usage d’arbres pour amender les sols.

Le semis direct est pratiqué aujourd’hui dans de très nombreux pays, avec un désherbant total (le glyphosate) et une variété OGM tolérante à ce désherbant. Cette solution « OGM » n’est-elle pas finalement la moins énergétivore ?

Il faudrait faire le bilan énergétique global en quantifiant l’énergie nécessaire à la production du glyphosate. N’étant pas agronome, je ne suis pas en mesure de le faire.

En blé, l’agriculture biologique apporte un rendement de 50 % inférieur à l’agriculture conventionnelle. En outre, les méthodes mécaniques entraînent une consommation d’essence importante. Dans ces conditions, l’AB est-elle vraiment le modèle du futur ?

Je n’ai aucune idée de ce que sera l’agriculture dans trente ans, et je ne suis pas certain que les agronomes le savent. Ce dont je suis certain, c’est que nous allons entrer dans un monde nouveau, avec de nouvelles contraintes.

Quelle est votre position au sujet des OGM ?

Je n’ai pas d’a priori contre. Quelle est en effet la différence entre une semence obtenue par transgenèse et une semence générée par exposition à un rayonnement, sinon que la première est régulée alors que la seconde ne l’est pas ? Je dis tout simplement que dans ce monde nouveau, nous allons devoir inventer de nouvelles choses. Je n’exclus pas par principe que les biotechnologies puissent y participer. Je pense en outre qu’une technique ne s’apprécie ni isolée de tout contexte naturel, social et économique, ni en termes purement monétaires, mais en fonction du type de société dont l’on veut s’approcher.

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