Suite aux nombreux articles de presse annonçant le souhait du Conseil national de l’alimentation (CNA) de réintroduire les farines animales dans l’alimentation de certains élevages, le Syndicat national des industries de la viande (SNIV), clairement déstabilisé par ce qu’il appelle « un emballement médiatique hors sujet », a réagi. Son communiqué de presse « invite à ne pas se prendre les pieds dans le tapis des farines animales et à cesser de tout mélanger ». Il précise que « les protéines animales transformées (PAT), dont il est question aujourd’hui, n’ont rien à voir avec ”ces farines” préciser ». Pour sa part, la vice-présidente du CNA, Véronique Bellemain, a indiqué que le texte de son organisme n’est qu’un « simple document de travail », et non un avis. « Le véritable avis sera remis en septembre, en même temps que les avis scientifiques. Notre rôle est uniquement d’étudier les aspects économiques et sociaux d’une éventuelle réintroduction », a-t-elle indiqué dans Le Monde. Le quotidien rappelle de son côté que la question de l’acceptabilité par le consommateur peut se poser.
« Encore faut-il ne pas tricher avec les consommateurs ! », rétorque le Dr Jean-Louis Thillier, expert judiciaire européen et spécialiste des questions relatives à la sécurité sanitaire. « Or, ce qu’écrit le SNIV, dans son communiqué rédigé visiblement dans l’urgence, n’apporte pas une information sérieuse. On sait depuis 1961 que l’agent pathogène de la vache folle se transmet par voie digestive. Or, le tube digestif de la vache, contrairement à celui du veau, fait barrière. En conséquence, ce sont bien les croquettes – c’est-à-dire les PAT et non pas les farines animales qu’on servait aux veaux et aux agneaux –, qui ont été la source principale de la contamination anglaise », rappelle l’expert, qui a publié dès septembre 2007 une charte en dix points permettant un usage sécurisé des farines animales et des PAT (voir le texte).
En résumé, il s’agit de mettre en place quatre niveaux de sécurité complémentaires. Premièrement, les PAT et les farines animales doivent être fabriquées à partir de sous-produits sécurités, de catégories C3, c’est-à-dire provenant d’animaux propres à la consommation, mais non destinés à l’alimentation humaine. Deuxièmement, il faut maintenir les tests, car si la souche anglaise de la vache folle est en voie de disparition, des souches sporadiques continuent à circuler, notamment la souche H et L toujours présente. Chez les ruminants, les tests doivent être maintenus et réalisés pour tous les bovins âgés de plus de 20 mois au niveau de l’encéphale, tandis que pour les petits ruminants (ovins et caprins), les tests doivent être obligatoires pour tous les animaux, quel que soit l’âge, au niveau de la rate. Troisièmement, il faut bien entendu éliminer les matériaux à risques spécifiques (MRS) chez les bovins. Enfin, comme il peut rester de petites zones résiduelles contaminées sur les carcasses, il faut appliquer le système de « l’autoclave », à savoir le chauffage des carcasses à 133 ° C, à 3 bars et pendant 20 minutes, sur des particules de moins de 50 mm.
« Ces quatre étapes permettent un niveau de sécurité pour une réintroduction des PAT et des farines animales qui apportera des avantages considérables, notamment pour l’environnement, mais aussi pour le consommateur, qui bénéficiera d’une alimentation de meilleure qualité gustative et moins onéreuse à produire », conclut le Dr Thillier.