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WeFarmUp.com bouleverse l’écosystème agricole

WeFarmUp vient de remporter la 12ème édition de la BFM Académie. Première start-up agricole française, elle souhaite restaurer la compétitivité des exploitants agricoles en créant une rupture dans les pratiques des agriculteurs. Explications de Jean-Paul Hébrard, son co-fondateur.

On vous qualifie souvent de « Airbnb du matériel agricole ». Quels services proposez-vous précisément ?

Jean-Paul Hébrard : Créée il y a dix-huit mois avec Laurent Bernède, WeFarmUp.com est en effet une plateforme Internet. Elle permet de mettre en relation les agriculteurs ayant besoin de matériel agricole avec ceux qui en louent. La durée de la location – totalement sécurisée car assurée par Groupama – est de 24 heures ou davantage selon les besoins. A la différence des Cuma, l’agriculteur n’est donc pas obligé de passer par la case banque et achat. Notre offre complète d’ailleurs celle des Cuma, dont certaines participent déjà à WeFarmUp pour mieux rentabiliser leurs propres achats.

Cette initiative répond à un besoin essentiel de l’agriculture française : réduire considérablement les charges des exploitants par la diminution de l’immobilisation des capitaux. En France, nous sommes clairement confrontés à un problème de suréquipement avec un capital matériel immobilisé par hectare dix fois supérieur à celui de certains de nos concurrents sur les marchés internationaux des céréales. Cela pénalise de fait notre compétitivité.

Pourquoi ce problème n’a-t-il pas été pris en main par les organisations agricoles ?

Cela est d’autant plus étonnant que ces chiffres sont connus depuis longtemps de tout l’écosystème para-agricole. Pendant des années, on a incité l’agriculteur à investir dans du matériel toujours plus performant certes, mais toujours plus cher. Le prix d’un tracteur a doublé en vingt ans, celui d’une charrue en dix ans ! Tant que la marge de l’agriculteur le permettait, tout le monde laissait ce système perdurer : la banque qui prêtait, le constructeur qui construisait, le concessionnaire qui vendait, et même la presse qui engrangeait des pages de publicité. Et ce avec la bénédiction de l’Etat qui incite à l’achat en procédant à la dé fiscalisation des bénéfices, alors qu’il aurait été bien plus pertinent de mettre en place un réel mécanisme de lissage des revenus.

Aujourd’hui, cet édifice ne fonctionne plus pour deux raisons : d’une part, la variabilité des prix agricoles rend les emprunts difficiles à prévoir. C’est notamment ce qui explique pourquoi certaines exploitations déposent aujourd’hui le bilan. D’autre part, nous avons de plus en plus de concurrents à l’échelle mondiale qui affutent leur compétitivité. Comment rentabiliser aujourd’hui la même moissonneuse-batteuse, utilisée sur une ferme de 5000 hectares en Ukraine et de 300 hectares dans la Beauce ? Si nous ne voulons pas de fermes géantes en France, il faut inventer de nouvelles formes de mutualisation des investissements.

Vous êtes président d’une association dénommée #CoFarming. De quoi s’agit-il ?

Avec WeFarmUp, nous avons été les premiers au monde à proposer aux agriculteurs une forme d’économie du partage pour mieux rentabiliser leurs achats. Et ça marche ! En un an, nous sommes déjà devenus la première concession de France avec plus de 4500 matériels proposés à la location. Depuis, de nombreuses plateformes se sont créées pour mutualiser d’autres actifs. Citons par exemple EchangeParcelleAgrifind qui permet aux agriculteurs de conseiller d’autres agriculteurs, Laballeronde pour l’échange de fourrages ou encore FarmLeap qui est une forme de Ceta numérique. L’association #CoFarming regroupe tous les sites qui utilisent la puissance du numérique pour mettre en relation les agriculteurs entre eux. Ce qui nous intéresse, ce sont les possibilités désormais offertes de coopération numérique entre agriculteurs.

Est-ce pour cette raison que des coopératives travaillent avec WeFarmUp ?

En effet, nous leur apportons l’expertise nécessaire pour créer un maillage territorial numérique tout en aidant leurs adhérents à retrouver de la compétitivité. C’est la base pour mettre en place un schéma de coopération numérique. Nous avons développé un savoir-faire dans ce domaine en interconnectant les fermes entre elles et en créant des routes numériques permettant de développer de l’entraide 3.0. L’agriculteur retrouve ainsi de la compétitivité. Ce système répond à un besoin des coopératives : être en mesure d’aider leurs adhérents à dépasser la période difficile qu’ils traversent. C’est pour cela qu’un nombre croissant d’entre elles se tournent vers nous.

En outre, nous allons nous développer à l’étranger dès cet automne. Notamment en Belgique, où la profession agricole nous sollicite pour trouver des solutions afin d’améliorer la compétitivité de leurs agriculteurs. Depuis notre création il y a un peu plus d’un an, de nombreuses plateformes comme WeFarmUp ont éclos. C’est le cas au Danemark, aux Etats-Unis, en Inde et même en Afrique avec Hello Tractor ! Nous ferons tout pour que la France reste pionnière et leader mondial du #CoFarming.

Et si, au départ, les constructeurs et les concessionnaires nous regardaient un peu comme une poule regarde un couteau, aujourd’hui ce sont eux qui viennent vers nous. L’entraide 3.0 est bien en marche !

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