AccueilEditoUne « erreur de droit » de la cour d’appel de Marseille ?

Une « erreur de droit » de la cour d’appel de Marseille ?

« Lors d’une séance au Conseil d’État [le 6 mars], la rapporteure publique a proposé le renvoi d’une affaire liée aux conditions d’emploi de deux insecticides à base de sulfoxaflor », note Agrafil. L’affaire remonte à janvier 2022, date à laquelle la cour administrative d’appel de Marseille avait confirmé l’annulation par le tribunal administratif de Nice des autorisations accordées par l’Anses au sulfoxaflor (matière active du Closer et du Transform).

Tandis que Générations Futures se réjouissait de cette décision, A&E avait alors estimé « probable l’annulation de cette décision par le Conseil d’État ». En raison notamment d’un abus flagrant de l’usage du principe de précaution (voir l’article « Sulfoxaflor : du mauvais usage du principe de précaution »), à l’origine de cette interdiction. En effet, non seulement celle-ci n’est pas conforme à l’esprit du principe de précaution dans le sens où elle n’est ni provisoire ni proportionnée, mais de surcroît elle fait fi de la procédure d’évaluation réalisée par l’Anses – que les magistrats ont fait le choix d’ignorer.

Dans son réquisitoire, la rapporteure publique a cependant relevé une « erreur de droit » supplémentaire. Elle rappelle que l’interdiction a été motivée par les juges « en raison des conditions d’emploi insuffisamment précises ». Or, ces conditions d’emploi, qui figurent sur les étiquettes, s’adressent à « des professionnels avertis », a objecté la rapporteure publique. Autrement dit : les agriculteurs sont des professionnels responsables parfaitement capables de lire et de respecter la notice d’usage d’un produit, contrairement à ce que suggèrent les magistrats de Marseille ! Et d’ajouter que, selon elle, « l’effectivité de l’application de ces conditions d’emploi paraît suffisamment garantie » également par les dispositifs d’inspection et de contrôle. D’où cette « erreur de droit » commise par la cour, qui aurait estimé, de façon erronée, que les conditions d’emploi laissaient « trop de place à l’appréciation subjective des utilisateurs », alors que ces mesures soi-disant « insuffisamment précises et contraignantes » ont été déterminées par les experts de l’Anses, dont la compétence en la matière ne peut pas être mise en cause. 

En se substituant de facto aux experts des agences sanitaires, les magistrats sont donc sortis de leur champ de compétence, pointe la plaidoirie de la rapporteure. Reste à espérer que le Conseil d’État, qui doit se prononcer dans un mois, validera ses conclusions. Une décision indispensable pour garantir la légitimité de l’Anses, une agence du service public dont la mission est justement d’apporter un éclairage scientifique aux responsables politiques et… aux magistrats !

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