Jean Wohrer, président de la Fédération nationale des jardins familiaux et collectifs (FNJFC), dresse un état des spécificités des jardins familiaux
Quels sont les besoins des jardiniers en matière de semences ?
Sachez que notre fédération représente environ 14 000 jardiniers répartis sur 180 sites de jardins, qui sont tous gérés par des structures associatives, distribuées sur l’ensemble du territoire français. Associations qui participent à la cohésion sociale des habitants et à la vie de leur quartier.

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Tout comme les maraîchers professionnels, nos jardiniers souhaitent pouvoir récolter le fruit de leur travail, et cela indépendamment des aléas climatiques. Or, les problèmes se sont multipliés au cours de ces dernières années : trop de pluie ou une sécheresse persistante, un début de printemps trop précoce, beaucoup plus de maladies et de ravageurs… D’où la nécessité de se procurer des variétés bien adaptées.
Cependant, à la différence des professionnels, souvent spécialisés dans un petit nombre de cultures, nos jardiniers cultivent beaucoup d’espèces différentes sur un espace souvent inférieur à 100 m2. Ce qui est bien suffisant pour une autoconsommation de légumes, qui peuvent être récoltés au bon moment et présentent par conséquent une qualité gustative très appréciable. Bien cultivée, cette surface permettra une économie qui peut avoisiner les 1 500 euros d’achat de légumes. C’est donc un apport fondamental pour les familles qui ont de petits budgets, comme celles des jardins familiaux.
Nos adhérents travaillent sur la coexistence d’espèces différentes sur la même parcelle. Cette recherche de diversité s’accompagne d’efforts réalisés sur la présence des insectes, avec la création d’« hôtels » pour les accueillir. Ainsi, riches de ces nombreuses cultures, nos jardins constituent de véritables laboratoires de biodiversité végétale, souvent situés au cœur des villes ou dans des zones très proches.
Pourquoi les jardiniers réutilisent-ils souvent les mêmes variétés ?
C’est pour limiter les risques. Lorsqu’une variété donne satisfaction dans un jardin, son propriétaire préférera généralement la conserver. Soit en rachetant la même variété, soit en la reproduisant avec ses propres semences. Cela explique la stabilité des achats. Cependant, certains jardiniers, curieux des nouveautés apportées par la sélection variétale, s’aventurent à essayer une variété différente. Si elle apporte de bons résultats, le bruit s’en répand parmi les jardiniers et elle peut se développer. Mais cela ne se fait pas du jour au lendemain !
Une variété dite « ancienne » est souvent jugée plus rassurante. Ce qui ne garantit pas pour autant qu’elle soit plus résistante, par exemple face au mildiou pour les tomates, ni qu’elle empêchera les limaces de se précipiter pour se régaler des salades estampillées « anciennes ». D’où l’importance de disposer de produits de protection des cultures aussi efficaces que possible, même si la palette utilisable dans les jardins potagers privés est bien plus restreinte que celle des professionnels. D’ailleurs, n’oublions pas qu’une variété « ancienne » a été « nouvelle » un jour ! Aussi n’y a- t-il aucune raison d’établir une hiérarchie entre les deux. Tout est question d’adaptation au sol, au climat et aux ravageurs d’un lieu donné.
En haricot, par exemple, il existe des nouvelles variétés grimpantes intéressantes, qui entrent parfaitement dans la proposition de notre fédération de jardin vertical, où le jardinier peut produire davantage sur des supports. Celles-ci sont souvent particulièrement goûteuses, ou encore sans fil et avec un excellent rendement. Autre exemple : les nouvelles variétés de haricots nains qui sont plus faciles à récolter, car les gousses sont au-dessus de la végétation.
Il faudrait que les bénéfices et qualités des variétés nouvelles soient mieux connus des jardiniers. Pour améliorer nos possibilités de choix, nous avons besoin de descriptions précises et de données fiables sur les caractéristiques des variétés. Il est donc important que les obtenteurs signalent les intérêts de leurs créations afin de faire évoluer la gamme variétale, et surtout que les distributeurs en fassent la promotion. Sachant que le point le plus indispensable reste la faculté germinative des semences, qui doit être excellente. Il est donc toujours préférable de passer par des distributeurs agréés, qui commercialisent des semences garanties, car contrôlées.
Enfin, compte tenu des aléas climatiques, il est certain que, dans l’avenir, les jardiniers seront contraints de faire évoluer encore davantage leurs choix variétaux, et les obtenteurs devront être en mesure d’y répondre. En fin de compte, qu’il s’agisse des professionnels ou des amateurs, la demande est assez similaire et le statu quo n’est pas une option.