Dans sa guerre de sape contre l’agriculture, Corinne Lepage a déposé un recours afin de limiter les épandages agricoles. Faute de preuves convaincantes, le Conseil d’État n’a pas retenu les arguments avancés par l’avocate
Depuis que Corinne Lepage a délaissé son parti politique – Cap21/ LRC – aux résultats médiocres, ainsi que son association anti-OGM – le Criigen – devenue léthargique à la suite, notamment, du départ de Gilles-Éric Séralini, elle se concentre désormais sur son activité d’avocate.
Feu juridique tous azimuts
On la voit en effet s’impliquer dans de nombreuses procédures ciblant les activités agricoles en général, et les pesticides en particulier. Le cabinet Huglo Lepage Avocats est d’ailleurs partenaire de l’association Justice Pesticides, créée en 2017 par l’ancienne ministre écologiste. Selon les dires d’Arnaud Apoteker, son délégué général, l’objectif de l’association est de « contribuer à la multiplication des procès contre les empoisonneurs ».
Ainsi, Corinne Lepage démultiplie sa présence dans les prétoires, qu’il s’agisse, par exemple, du recours très récent visant la cellule Déméter, déposé à la demande de Pollinis et Générations Futures, ou de celui mettant en cause l’autorisation de mise sur le marché délivré par l’ANSES pour le Roundup Pro 360. En outre, l’avocate accumule les recours en défense des maires ayant pris des arrêtés antipesticides.
Si, pour certains d’entre eux, Corinne Lepage peut se féliciter d’avoir obtenu gain de cause, tel n’est pas le cas du dernier en date, à savoir son recours auprès du Conseil d’État déposé au nom de Respire, une association fondée en 2011 et présidée depuis 2015 par Olivier Blond, qui officiait jusque-là à la Fondation GoodPlanet, en tant que conseiller et speechwriter de son président Yann Arthus-Bertrand.
Dépôt d’un recours en plein confinement
Ainsi, en plein confinement, alors que le monde agricole se mobilise comme jamais auparavant pour nourrir la population française, Respire et Corinne Lepage n’ont pas hésité à saisir la plus haute juridiction administrative pour obtenir la fin des épandages agricoles (lisiers et engrais), au prétexte qu’ils « aggraveraient la pandémie ». Lors de l’audience du 16 avril dernier, l’association requérante a présenté trois études afin de justifier sa demande d’interdiction : une étude chinoise datée du 20 novembre 2003 concernant le SRAS et la pollution en général, une étude américaine du 5 avril 2020, ainsi qu’une étude italienne « qui n’a pas encore fait l’objet d’une publication par une revue scientifique dotée d’un comité de lecture », comme l’a rappelé le Conseil d’État dans les conclusions de son ordonnance rendue le 20 avril. Rejetant les arguments de la requérante, notamment en raison du fait que l’étude américaine portant sur des différences d’exposition aux particules PM 2,5 concerne « une exposition de long terme, retenant des durées d’exposition de plusieurs années minimum et pouvant aller jusqu’à dix à quinze ans », le Conseil d’État a conclu que l’absence de mesures de limitation des épandages ne constituait en aucun cas « une atteinte grave et manifestement illégale aux droits au respect à la vie et à la protection de la santé ».
« L’association Respire avait de solides arguments », note Stéphane Mandard, ancien journaliste sportif du Monde devenu, depuis qu’il a rejoint le service Planète du quotidien, le « porte-voix » des ONG antipesticides. Pourtant, l’ordonnance souligne qu’aucun dépassement du seuil d’alerte n’a été recensé, « contrairement à ce qui avait pu être observé pendant la même période au cours de l’année 2019 ». Et de préciser qu’en 2020, « 18 dépassements du seuil d’information (50 μg/m3) ont bien été enregistrés dans neuf régions, mais ne se sont pas prolongés pendant les deux jours nécessaires pour représenter un épisode de pollution tel que défini par la législation ».
Au mépris de ces vérités, Mme Lepage compte bien poursuivre sa croisade judiciaire et a déclaré au quotidien du soir avoir déjà prévu « de se retourner de nouveau devant la haute juridiction » pour, cette fois- ci, « dénoncer, avec le collectif des maires antipesticides, les épandages de pesticides qui continuent à proximité immédiate des habitations mal- gré le confinement ». Au moment où le secteur des fruits et légumes, souvent cultivés à proximité des habitations, est déjà passablement mis en difficulté par le manque préoccupant de main-d’œuvre saisonnière, n’y a-t- il pas dans cette obstination aveugle quelque chose qui frise l’indécence ?